La proposition de programme pancanadien d’assurance médicaments : le mythe constitutionnel du pouvoir fédéral de dépenser
Dans: Notes de rechercheLa proposition du gouvernement fédéral d’établir un programme pancanadien d’assurance médicaments est devenue un enjeu phare du présent mandat du Parti libéral du Canada. À l’exception du Québec, aucune province canadienne ne dispose de régime universel d’assurance médicaments, de telle sorte que près d’un Canadien sur quatre hors Québec ne détient aucune assurance, ni privée, ni publique. En conséquence, Ottawa propose essentiellement d’instaurer un nouveau transfert fédéral destiné à toute province qui accepterait d’implanter un régime universel d’assurance médicaments conforme aux normes élaborées par le Parlement du Canada.
Cette proposition se révèle toutefois inconstitutionnelle : le Parlement du Canada ne détient pas la compétence législative d’adopter un tel programme, qui relève plutôt des compétences provinciales sur la propriété et les droits civils, sur les matières de nature purement locale et, subsidiairement, sur la santé. De plus, le soi-disant pouvoir fédéral de dépenser sur lequel Ottawa prétend pouvoir appuyer sa proposition s’avère n’être qu’un mythe constitutionnel. Cette prérogative n’a aucun fondement textuel ou jurisprudentiel, en plus d’être irréconciliable avec le pouvoir de taxation du Parlement fédéral, de contourner l’essence de l’obligation d’Ottawa d’assurer des paiements de péréquation et d’être contraire au principe du fédéralisme. Même en admettant l’existence du pouvoir fédéral de dépenser, le programme proposé n’en respecterait pas les limites généralement admises, puisqu’il s’immiscerait de manière trop profonde et astreignante dans les sphères de compétence souveraines des provinces.
En imposant ses vues aux provinces en échange de subsides fédéraux, Ottawa violerait le pacte fédératif canadien et retirerait aux provinces une partie de l’autonomie que leur garantit la Constitution. D’autres solutions permettraient d’attaquer de front le problème d’accès aux médicaments, notamment en accordant aux provinces l’autonomie financière nécessaire à ce qu’elles développent par elles-mêmes leurs propres régimes publics. La combinaison de ces régimes universels offrirait finalement à l’Alliance pancanadienne pharmaceutique le nombre critique d’assurés lui permettant de négocier des baisses de prix substantielles pour les médicaments d’ordonnance couverts par les provinces.